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Je ne veux plus

Journal « Regain, décidement Verts » - Coutances 2006

samedi 12 août 2006, par Natalie Gandais

Cher-e-s ami-e-s,

Pour moi, l’aventure « Reconstruire – Désir de Vert – Regain, décidément Verts » s’achève. Je n’aime pas ce que nous sommes devenus, et je n’ai pas envie d’essayer de continuer. Notre diversité, d’origines politiques, de militantismes, de compétences, faisait notre richesse, mais nous n’avons pas su faire vivre cette diversité. Parce qu’une partie d’entre nous, je le crains, ne veut tout simplement pas changer la société, ne veut tout simplement pas qu’on se donne les moyens « maintenant tout de suite », d’un monde plus écologiste, plus juste, plus solidaire. J’illustrerai mon désarroi par l’échec la co-élaboration, et celui du refus du TCE par un grand nombre d’entre nous.

La co-élaboration, après la recherche des convergences solidaires, était l’originalité politique de DDV-RDV, son originalité « externe ». Peut-être l’enjeu n’était-il pas clair aux yeux de nous tous ? L’énorme travail de fabrication du programme 2007 n’en a pratiquement pas tenu compte. Serons nous capables, quand nous présenterons le programme aux électeurs, de dire : telle mesure est proposée en accord avec telle assos, telle orga, tel syndicat ??? Non. Avons nous suffisamment travaillé en confiance avec ces orgas, syndicats, assos pour qu’elles puissent dire, au moment des élections : ces sont les Verts qui prennent le mieux en compte nos attentes, les attentes de nos adhérents ? Encore moins. Le pari de la co-élaboration, c’était celui-là, qui devait aussi améliorer notre rapport de forces face au PS : pari perdu.

Ce sont le discours, les arguments de ceux qui ont prôné le Non au TCE, chez nous, qui m’ont éclairée sur les raisons de l’échec. J’ai eu le sentiment que cette campagne « le TCE n’est pas assez bien, alors votez Non » a dévoilé d’autres motivations : il est plus facile d’être éternellement dans l’opposition et la revendication que de se retrousser les manches pour changer maintenant tout de suite la société, avec les moyens institutionnels dont nous disposons. C’est plus facile de flatter l’électeur en lui disant « refusez ces vilaines institutions, refusez cette vilaine société libérale ». Et après ? On attend quoi ? Qu’il y ait suffisamment de malheureux pour faire la révolution ? Comme à l’époque où Thorez s’opposait à l’avortement, parce que pour faire la révolution, on avait besoin de beaucoup de petits prolétaires malheureux ? J’hésite à qualifier cette démarche de « révolutionnaire », je crois que c’est ce qu’on nomme « gauche protestataire ». Et bien j’ajouterai « soi-disant gauche » protestataire, qui finalement ne veut rien changer pour garder sa place de protestataire.

Naïvement, j’avais cru que faire courant commun avec les protestataires nous pousserait à avancer, à proposer un programme plus exigeants dans ses réformes, à peser pour un accord de gouvernement plus Vert. J’ai par contre rapidement compris que ça ne donnerait pas une Europe plus écologique, moins libérale et plus juste…

Alors je crois aujourd’hui que cette gauche protestataire est un frein aux réformes radicales dont la société a besoin, et auxquelles je travaille patiemment chaque jour dans le cadre de mon mandat d’adjointe d’une petite ville de province, dans ma pratique de la démocratie participative avec les conseils de quartiers et de sages, avec les assos environnementales, avec les acteurs de l’économie sociale et solidaire, et je ne veux plus faire « courant commun » avec celles et ceux d’entre nous qui sous prétexte d’être « plus à gauche », freinent ce travail, le travail des élu-e-s vert-e-s et les efforts considérables des organisations du mouvement social.

Bien amicalement

Natalie Gandais-Riollet